En guise d'introduction

Ni en poésie
Ni en renga on ne trouve
Les bons petits plats
Bunrin, cité par Bashô (in " Friches ")

Mes premiers contacts avec la cuisine japonaise datent des années 1970. Pour être précis, de l'achat d'un ouvrage de Rafael Steinberg, " la cuisine japonaise" de la collection Time Life "la cuisine à travers le monde".

Si l'auteur, un américain ayant vécu longtemps au Japon, professait une grande admiration pour cette cuisine, le conseiller de rédaction française, le critique gastronomique Robert Courtine, était loin d'être enthousiaste. La nouvelle cuisine n'avait pas encore été inventée, et les aliments parfois fades, crus et en petite quantité ne pouvaient plaire à des français assurée de la précellence de leur cuisine et attachés à des agapes gargantuesques fort éloignées de la sobriété nippone.

J'ajouterai qu'en ces années, la surgélation était balbutiante et que le coût du transport aérien était prohibitif. Les ingrédients asiatiques étaient difficile à se procurer, la "fraîcheur" des produits de la mer achetés aux Halles de Paris n'était pas de nature à pousser à les consommer crus. Avec la fougue du néophyte, j'ai néanmoins testé certaines recettes, pas trop éloignées du goût et des moyens d'un étudiant.

Mais comme dit le proverbe chinois, "celui qui apprend tout seul enseigne à un imbécile".

Mon second contact eut lieu 15 ans plus tard, au hasard d'un travail en hygiène alimentaire dans un aéroport. A l'occasion de visite de sociétés fournissant les plateaux repas des compagnies aériennes, j'ai pu voir un chef japonais au travail. Du strict point de vue de l'hygiène personnelle, de l'ordre et du respect des matières premières, bien des cuisiniers français auraient eu des leçons à prendre. Et c'est heureux, car la cuisine japonaise comprend des phases de découpe fine, de manipulation et de refroidissement par trempage en eau glacée favorables au développement bactérien.

"Le Règlement des monastères nous dit : "Lors de la préparation des repas, le cuisinier doit veiller personnellement à la parfaite propreté de toute chose" [...] Après avoir mis le gruau dans la marmite et ajouté la juste quantité d'eau, ne relâchez pas votre surveillance car rien ne doit venir le souiller, ni une souris par mégarde, ni le regard curieux d'un flâneur. Le cuisinier prépare ensuite les légumes qui accompagne le gruau du matin et range les ustensiles et récipients qui ont été utilisés pour cuire le riz et la soupe du repas de midi. Vérifiez leur absolue propreté et placez en haut ce qui est fait pour aller en haut et en bas ce qui est fait pour aller en bas..."

Instructions au cuisinier zen, Dôgen ( 1200-1253, introducteur de la secte Zen au Japon)

Mon troisième contact eut lieu en 1992 : trois semaines à Kyoto, pour une conférence sur l'environnement. Deux week-end d'escapade à Nara et à Matsue. Une révélation. Fraîcheur et qualité irréprochable, même dans des petits établissements ne payant pas de mine. Cuisine sans graisse, équilibrée qui m'a permis de perdre quelques kilos superflus. Seules surprises désagréables : les prix, les Sushi à la pieuvre crue et les soupes de praires au petit déjeuner … 

les mains pleines de praires

rayonnant de joie

il appelle son ami

Shiki

Neige à l'aube sur le mont Hira (Hira no Bosetu)

Matin de neige

La fumée monte de la cuisine

Réjouissante

Buson (1715-1783)

 

Que dire de la cuisine japonaise? Qu'elle est beaucoup plus riche et variée qu'on ne le croit. Elle ne se cantonne pas uniquement aux poissons crus, si succulents soient ils : on trouvera ici des recettes de fondues, de viandes en sauce sucrées, d'omelettes …

La cuisine japonaise semble inspirée par les conseils de Curnonsky "Faites simple" et "Laisser aux choses le goût de ce qu'elles sont". Il n'existe pas de préparations très compliquées. Toute sa finesse réside dans l'utilisation de produits ultra frais, au fil des saisons. Tant pis s'il faut manger un poisson sur une courte période, jusqu'à plus faim, puis attendre un an pour recommencer.

On recherche avant tout le respect des saveurs de base. Il n'entre quasiment pas d'épices dans les préparations, à la différence des autres cuisines asiatiques. La saveur typique du Japon repose essentiellement sur le bouillon de bonite, le saké et les dérivés du soja.

Ne pas oublier que la cuisine est également une esthétique : la qualité de la présentation et de la vaisselle sont primordiales. "La cuisine japonaise, a-t-on pu dire, n'est pas chose qui se mange, mais chose qui se regarde..." (Tanizaki Junichiro, Éloge de l'ombre).
Les poteries japonaises, dérivées de modèles coréens ou chinois sont parmi les plus raffinées au monde. Et les plus chères, hélas... 

Comme en France, il existe des cuisines régionales et des cuisines différentes selon les couches sociales : bol de nouilles ou Donburi des travailleurs, cuisine végétarienne bouddhistes, repas raffiné des auberges ryokan. Comme en France, la cuisine a évolué au fil des siècles, selon les influences d'autres nations.

On trouvera ici des recettes contemporaines familiales, assez faciles à réaliser et ne nécessitant pas des ingrédients introuvables.  

 

LES FABULEUSES GRENOUILLES NINJAS;

 

 

 

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