CHA NO YU (eau chaude du thé) 

 Hokusai plantation de thé

Tous les thés sont constitués par les feuilles d'une espèce d'arbuste de la famille du camélia :"Thea sinensis". Pour compliquer les choses, il est parfois appellé "Camelia sinensis"avec une hésitation sur le nombre de "l" du nom de genre, dérivé de celui d'un botaniste, le père Camel. Et certains considèrent que le théier d'Assam appartiendrait à une autre espèce, ou à une sous espèce...

Ceci n'est pas très sérieux et les taxonomistes (les dignes scientifiques qui s'occupent de classification des espèces) pourront discuter tout leur saoul, seule la préparation des thés est importante.

Thea sinensis, gravure européenne du XIXème siècle

Les thés consommés en Europe sont dits " noirs ". Les feuilles sont récoltées à maturité, légèrement déshydratées, roulées pour libérer les enzymes cellulaires indispensables à l'étape ultérieure de fermentation puis séchées.

Les japonais boivent du thé vert produit avec de jeunes feuilles, torréfiées immédiatement après la récolte pendant une trentaine de secondes, ce qui inhibe toute fermentation.

 

" J'ai sorti le bol à thé noir de Chòjirò, que m'avait donné Maître Rykyù : une partie de la surface est encore nue, due à l'insuffisance du vernis, mais cette irrégularité est artistiquement intéressante, ainsi que la forme galbée dans la partie inférieure, une lèvre légèrement épaisse et un mince piétement. "

Le Maître de thé, INOUE Yasushi

 

Le thé fut consommé pour la première fois en Chine, en l'an 2737 avant notre ère, par le dernier des Trois Augustes Empereurs Dieux, le fabuleux Shen Nong, inventeur de l'agriculture et de la médecine. Une feuille de théier tomba par hasard dans une de ces tasses d'eau chaude que les dieux et les hommes buvaient à l'époque pour se désaltérer.

Ou bien, beaucoup plus tard, un prince indien du nom de Dharma, ne pouvant respecter un voeu de rester éveillé pendant sept ans se trancha les paupières qui, tombant sur le sol donnèrent naissance au théier qui tient éveillé.

C'est donc pour garder l'esprit clair durant les longues cérémonies et pour cimenter leur communauté que les moines bouddhistes de la secte Tendai introduisirent le thé de Chine, en 805. Le thé des Tang se présentait en briques que l'on cassait et il était parfois mélangé avec des épices, du riz, du sel...

"Il n'est pas déplaisant

De composer des vers

Alors que l'on entend

Le broiement d'un bon thé."

 

 Bol pour la cérémonie du thé. Création personnelle

 

De nombreuses plantations de thé furent réalisées, puis le Japon se ferma aux influences étrangères. Ce ne fut qu'au XIème que l'invention des Song, la poudre de thé vert pénétra au Japon, grâce à la secte Rinzai. En Chine, les barbares Ming, destructeurs de l'empire Song, imposèrent le thé infusé qu'ils firent connaître aux Occidentaux.

Le thé vert ne resta utilisé qu'au Japon.

Derrière l'écran

lorsqu'on a moulu le thé

ah quelle froidure

Sharei, in Bashô, "le faucon impatient"

 

C'est au XVIème siècle, à l'époque des premiers shoguns que le rituel du thé prit toute sa signification et toute sa splendeur. Tel Louis XIV dansant à Versailles devant une noblesse asservie, le Shogun Hideyoshi prépara de ses mains le thé pour un parterre de guerriers rustres, dans un pavillon doré à l'or fin, décoré d'œuvres d'art, pour certaines importées d'Europe.

Tokugawa, brasero à thé

Brasero en or, dot d'une fille du 3ème shogun Tokugawa (1637)

Catalogue d'exposition, Montréal

 

Le style Sôan (cabane de paysan) prôné par le maître Sen Rikyû était exactement à l'opposé : vase à fleur et instruments de bambou, poteries simples… Les princes n'aiment pas les esprits trop libres : après avoir été avoir longtemps supporté, voire soutenu par le Shogun, le maître reçut de ce dernier l'ordre de quitter le monde. Une opposition supposée aux conquêtes en Corée et le refus de donner sa fille au Shogun ne furent que les excuses immédiates d'une mort annoncée.

 "Il y a un chemin glacé et desséché, sur lequel avance Maître Rikyù ; devant lui, marche Monsieur Sòji Yamanoue ; derrière lui, Monsieur Oribe Furuta. Je crois que c'est cela que mon Maître veut me montrer. C'est cela à quoi je repense, sans cesse. Lorsque Messieurs Sòji et Oribe reçurent l'ordre de se donner la mort, ils acquirent, pour la première fois, une certitude, la même que mon Maître. Ils découvrirent ce qui est le plus important pour l'homme de thé : préparer sereinement le thé, laisser faire le destin et ne pas tenter d'y échapper."Shishendo, Kyoto

Le Maître de thé, INOUE Yasushi

 

La cérémonie actuelle découle directement du style Sôan.

Une compagnie choisie se réunit dans un pavillon de bois, décoré d'un rouleau peint et de quelques fleurs de saison : tout doit donner une impression de simplicité, même si certains bols peuvent valoir des milliers de francs.

Quelques friandises, à base de haricot Azuki, sont prévues. Les instruments, la boite à thé et le bol, pourtant exempts de toute souillure sont nettoyés avec un linge de soie immaculé le fukusa.

Avec des gestes solennels, fruit d'années d'entraînement, le maître prend de l'eau fraîchement puisée et bouillie dans la traditionnelle bouilloire en fer, au-dessus du brasero à charbon de bois et il nettoie le bol. Le bol est essuyé avec une toile neuve.

Il mesure ensuite avec grand soin la poudre de thé vert dans le bol à l'aide d'une longue cuillère neuve en bambou.

Il verse l'eau et fouette le mélange jusqu'à obtention d'une écume vert jade. Chaque convive boit à son tour, le maître renouvelant le thé au fur et à mesure.

Une telle cérémonie durera 40 minutes, voire quatre heures, si un "Kaiseki", le repas traditionnel, est servi.

 

 Cha no Yu, cérémonie du thé

 

 

" Ces pots, tout comme les hommes, ont des fortunes diverses : certains passent de main en main et d'autres s'installent. Mais d'autres encore connaissent un sort similaire celui de leur propriétaire : " Mikazuki " et " Matsushima " disparurent ainsi dans un incendie à l'époque de Monsieur Sòkennin. Yaezakura , appartenant Monsieur Mitsuhide Akechi, gouverneur de Hyuga, disparut, lui, à la suite de la mort tragique de son propriétaire... Bien entendu, tous ne connaissent pas un tel destin! Dans ce catalogue, de nombreux bols sont cités ( à commencer par " Matsumoto " et " Insetsu " ) dont un, le bol de Jukò, périt dans les flammes après la mort de son propriétaire, Jikkyu Miyoshi, provoquée par une défaite militaire. "

Le Maître de thé, INOUE Yasushi

 

 

  Boîte a thé, début XXeme siècle

 

 

 

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